CINECRITIKIUM

 

 

 Fiche  1681 

 

 

n°1681
 
" Muriel "

( ou le temps d'un retour )

 

(1963)-(Fr)(1h57)  -      Drame    

 

Réal. :     Alain  Resnais   

 

 

Acteurs:  D.Seyrig, J-P.Kerien, J-B.Thierree ...

 
  Critiques Presse 

  bonnes            moyennes           mauvaises      critiques  nd    

 

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Critiques Spectateurs

  bonnes            moyennes           mauvaises

 

 

Incontestablement un très grand film, dans la lignée du prodigieux "l'année dernière à Marienbad"; Resnais réalise ici un film déroutant, profondément intense et d'une grande classe. Une émotion comme on en ressent rarement au cinéma.

Muriel ou le temps d’un retour est un autre chef d'oeuvre dans la carrière de Resnais et que l'on a tendance parfois à oublier, enveloppés que nous sommes par l'ombre de Marienbad et d'Hiroshima. Pourtant Boulogne-sur-mer compte tout autant, avec son hiver glacé, sa ville éteinte et son frisson du temps passé qui déchire. Resnais avait pris le contre-pied de son film précédent en travaillant avec la couleur, teintes ocres, délavées, salies par le temps, comme un vieux Kodachrome périmé qui n'en finit pas de se faner. Bouleversants Delphine Seyrig, Jean-Pierre Kérien et Jean-Baptiste Thierrée, sans oublier Nita Klein, pour une valse lancinante au pays d’autres ombres dont le parfum au goût amer ne cessera de nous hanter comme toute l'oeuvre de Resnais. Si Muriel ou le temps d'un retour est un très grand film c'est qu'il nous parle de mémoire, une nouvelle fois, mémoire des êtres qui n'en finissent pas de lutter avec leurs chagrins, leurs cicatrices, pour un dernier rendez-vous au pays de « douleurs si profondes qu'on peut en pleurer » (Wordsworth)

Souvent imité, rarement égalé ; il s’agit là d’un chef d’œuvre contenant simplement tout. ( J’ai pleuré. )

Excellent ! Le meilleur que j ai vu de Resnais (je vais m'appliquer à les voir tous). Quand Jean Champion chante "déjà" on est comme suspendu. A l'opposé, le retour (le temps d'une bande son de quelques secondes) du jeune soldat là où il n'aurait pas voulu être est d'une grande violence. Et puis la voix de Delphine Seyrig tout le long du film, c'est merveilleux. Un film très fort émotionnellement.

Le cadre de l'évocation, c'est Boulogne-sur-Mer en 1962, qui se souvient elle, jusque dans ses murs, des bombardements de la seconde guerre mondiale ... On le voit, la mémoire douloureuse demeure la préoccupation centrale de Resnais, mais elle se double ici d'une dimension politique. Comme Godard dans «Le petit soldat», il dénonce avec une acuité dérangeante la pratique de la torture en Algérie, sans la montrer directement comme le faisait Godard, mais en montrant ses répercussions psychologiques sur le personnage de Bernard. Sur le plan formel, le film explore, comme ses prédécesseurs, des structures narratives renouvelées. Point ici de narration linéaire, mais un récit qui, opportunément accentué par la musique de Henze, est reconstruit de manière très concise à l'aide d'un montage en tous points remarquable. Un très grand film donc, qui dégage une ambiance très particulière, étrange, sourde, oppressante, envoûtante ... C'était la grande époque de Resnais.

 

Le scénario de Jean Cayrol est quant à lui assez compliqué au premier abord. Il faut donc s’accrocher pour ne pas perdre le fil de l’histoire. Resnais nous livre de nouveau une réflexion sur la mémoire et la reconstruction psychologique : comment reconstruire les villes et les vies après qu’elles aient été détruites ? Comment se souvenir tout en se concentrant sur le présent ? Muriel ou le temps d’un retour présente aussi un aspect esthétique très travaillé, que cela soit au niveau de l’image ou du son. En effet, Resnais et son chef opérateur ont volontairement tourné les extérieurs en lumière naturelle par tous les temps mais en utilisant des cadrages parfois sophistiqués. 

«Muriel» comme «L'Année dernière à Marienbad» est narrativement déconstruit, amas de bribes de souvenirs entremêlés, de brèves réminiscences d'un passé que l'ont veut enfouir à jamais ou au contraire se remémorer et relève donc aussi de l'intime, revêtant un aspect sentimental et nostalgique. Sur le plan formel, «Muriel» est déjà plus en rupture avec les films précédents de Resnais. Même s'il poursuit son travail sur la narration non linéaire, c'est surtout visuellement qu'il évolue. En effet il s'agit du premier film en couleur du français, et il s'est servi de la coloration pour approcher davantage le réalisme. Il est donc assez déroutant de voir des plans savamment construits mais dotés de teintes volontairement « disgracieuses ».

Un film d'Alain Resnais ne ressemble définitivement à aucun autre. C'est le constat que l'on se fait losque l'on regarde ce "Muriel", et cela déjà après l'incroyable choc de l'inoubliable chef d'oeuvre "L'Année dernière à Marienbad". Car si l'oeuvre déroute par son montage alternant sans transitions passé et présent, tout cela n'en demeure pas moins admirablement mené, le plaisir étant également celui de savoir se perdre dans cette réflexion sur le temps, celui que l'on a connu et celui dans lequel on vit, mais également les conséquences que ce passé a pu avoir sur nous. On pourra alors toujours accuser Resnais d'intellectualiser inutilement, de rendre son propos parfois un peu flou... Mais "Muriel" s'arrête t'il vraiment à ces considérations? Il nous faut d'abord la voir comme une expérience cinématographique, difficile à aborder certes mais au propos en définitif universel et qui saura sans nul doute toucher chacun d'entre nous. Une oeuvre à part, mais qui n'en demeure pas moins une vraie réussite.

 

Bon décidément, je suis assez hermétique à Resnais... Le sujet pour l'époque est audacieux (la guerre d’Algérie) mais le traitement est tellement intello que je décroche assez vite.

Tout ce qui fonctionnait d’une façon magique dans Marienbad sent ici le procédé et le déjà vu, comme si l’auteur se parodiait lui-même, donnant à son œuvre une allure de soufflé qui retombe pour avoir été cuit trop longtemps ! Après cette tentative où il a visiblement épuisé tout ce qu’il avait d’intéressant à dire, Resnais donnera encore un film politique et raté (La guerre est finie) puis s’essaiera à la science fiction (Je t’aime, je t’aime) avant de se tourner définitivement vers le film commercial avec Stavisky et l’emblématique Jean-Paul Belmondo. Hélas, n’est pas Godard qui veut et Resnais passera progressivement pour le scénario de Cayrol à Jaoui-Bacri ! Grandeur et déchéance d’un réalisateur pétrifié, aigri et incapable d’assumer son destin…

 

 

 

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