CINECRITIKIUM

 

 

 Fiche  1651 

 

 

n°1651
 
" A nos amours "

 

 

(1983)-(Fr)(1h35)  -      Drame    

 

Réal. :     Maurice Pialat   

 

 

Acteurs:  S.Bonnaire, E.Ker, P.-L.Rajot,  ...

 
  Critiques Presse 

  bonnes            moyennes           mauvaises      critiques  nd    

 

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Critiques Spectateurs

  bonnes            moyennes           mauvaises 

 

 

De tous les Pialat contemporains A NOS AMOURS est sans doute le plus réussi. Il marque aussi le film absolu sur l'adolescence, cet âge difficile où l'on cherche à échapper à son milieu et à prendre son envol. Fasciné par son actrice, Pialat fait exploser son film en plusieurs blocs narratifs disparates, gorgés de vie, et séparés par de surprenantes élipses. Suzanne / Sandrine Bonnaire aime, n'aime plus, fuit, se cogne contre son frère, sourit à son père, se frite avec sa mère. Le film suit ce personnage avec un amour et un respect incroyables, non sans dureté parfois. La véracité de certaines scènes (le diner notamment vers la fin) comme si une caméra s'était glissée à l'insu des personnages. La vie explose dans ce portrait bouleversant d'une génération, sorte d'anti Boum et véritable manifeste pour un cinéma à la première personne. Présent à l'écran, Pialat est partout, jusque dans ses absences. Un choc.

Le film est un film détestable, on a toutes les raisons de ne pas l'aimer, tout comme les autres films de Pialat, pour la bonne et simple raison que Pialat ose aborder des choses sales et les filmer sans complaisance. Cette famille un peu malade n'est pas sans rappeler ce que l'on connaît de la famille, certaines phrases on les a déjà entendues, on a déjà vu certaines situations. On sent que ça n'est pas du chiqué et exagéré pour que ça rende bien sur grand écran. Si au début ça commence sur un sujet très adolescent amourette, sexe, ça dérive très vite vers la famille en général. Bonnaire est magnifique, elle avait déjà énormément de talent étant petite. Mais le plus impressionnant c'est Pialat lui même, qui avec son charisme en impose vraiment et dégage quelque chose d'énorme. Mais au delà de la prestation des acteurs, de la réalisation qui n'en fait jamais trop, qui ne balance pas de gros plans biens signifiants, il y a cette vérité. Au début la partie sur Bonnaire seule et ses amours ne m'a pas passionnée, c'était pas ce qu'il y avait de plus intéressant, mais petit à petit on découvre où Pialat veut en venir, jusqu'à ce dîner final saisissant et effrayant. Voir ce frère essayer de devenir le père de sa soeur, et plus, les rapports parents enfants assez étranges, c'est vraiment flippant et dérangeant. Bref Pialat, si vous ne l'aimez pas, il ne vous aime pas non plus !

Excellent film. Pialat signe ici un chef d'oeuvre autant pour l'écriture que pour la mise en scène. L'écriture est d'une qualité renversante. La recherche continuelle de soi même à travers la difficile période de l'adolescence. La recherche d'une forme de sexualité de la jeune fille pour espérer retrouver le lien perdu avec son père. L'adolescence comme mouvement vers l'adulte dans l'objectif de redevenir enfant : discours impressionnant. Ce qui frappe dans ce film, c'est la beauté des dialogues et la manière dont Pialat mêle les relations entre ses personnages : la mère et la fille, le frère et la soeur, l'amant et l'amante, l'homme et la femme ... Le jeu des acteurs est incroyable. Bonnaire premièrement, magnifiquement dirigée par Pialat : sa prestation est d'une qualité incontestable. Pialat quant à lui signe également une prestation éblouissante, toute en finesse et en émotions. Mention spéciale à la prodigieuse scène du repas qui sera certainement une des meilleures scènes à table de toute l'histoire du cinéma. A la fois trésor d'improvisation, d'écriture et de mise en scène. Pour ce qui n'a pas été dit, les plans sont esthétiquement très recherchés et la gestion du mouvement est très satisfaisante. A voir absolument.

Jean Gabin le disait, le répétait et le répétait encore : " pour faire un bon film, il faut une bonne histoire ". Maurice Pialat l'avait sans doute compris mieux qu'une majeure partie de ses contemporains... Et pour preuve : A Nos Amours constitue à mon sens le sommet de son Oeuvre, de sa filmographie peuplée de personnages profondément imparfaits mais foncièrement humains. Sandrine Bonnaire y trouve un rôle qui tient pratiquement du miracle, mêlant la fausseté d'une irritation au naturel d'un sourire. Toujours devant la caméra, on retrouve Dominique Besnehard - qui n'a jamais été aussi étonnant d'inimitié - ainsi que Maurice Pialat lui-même, qui n'hésite pas à tourner en dérision la raison de sa présence à l'écran. Rarement chez le cinéaste les rapports humains auront été traité avec autant de passion et de profondeur ( même Police - réalisé deux ans plus tard - n'atteindra pas un tel niveau de complexité psychologique ). C'est peut-être bien son meilleur film, du moins l'un des plus personnels et l'un des plus surprenants : un chef d'oeuvre.

Un très grand film servi par des acteurs exceptionnels..., à commencer par Maurice Pialat lui-même, qui, à chacune de ses apparitions, tire le film vers l'excellence. Son œil comme son personnage traque les imperfections et ne fait aucun cadeau, livrant du coup un film d'une exigence rare, frôlant parfois la perfection comme la scène de la réunion de famille où le père réapparait soudain dans le cercle familial. Un film d'une puissance exceptionnelle.

 

 Pour faire plus naturel, Pialat croit aussi devoir tourner sur un scénario décousu, décousu comme la réalité, mais le problème c'est que le cinéma est un art très structuré donc pour faire réaliste il faut se montrer un minimum structuré ; ce qui est un peu paradoxal c'est vrai mais bon... Tout est à jeter ??? Bon non justement, les deux discussions entre le père et la fille sont bizarrement très réussies ce qui contraste très fortement avec le reste. La séquence finale est même un beau moment qui surprend par sa justesse et sa force, et on ne peut que déplorer que l'ensemble du film ne soit pas du tout à la hauteur de cette dernière scène agréablement surprenante.

Assez désagréable à regarder du fait des esclandres incessants et des ellipses temporelles abusives, "A nos amours" ne manque toutefois pas de chien. Véritable fiel déversé à la figure de la société post-soixante-huitarde, le film de Maurice Pialat étonne par son audace et son non-conformisme. La scène finale du souper s'avère jubilatoire, elle constitue clairement le point d'orgue. Mais la pauvreté des dialogues à laquelle on a droit dans le reste du film, nous conduit indéniablement à la frustration. Quel dommage que l'ensemble ne soit pas du même acabit, c'est-à-dire sulfureux, provocateur, acidulé.

 

Pialat ne nous aime pas, ca tombe bien, je ne l'aime pas non plus, et son film avec.

 

 

 

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