CINECRITIKIUM

 

 

 Fiche  1283 

 

 

n°1283
 
" The Intruder "

 

 

(1962)-(Am)(1h24)  -      Drame    

 

Réal. :     Roger Corman   

 

 

Acteurs:  W.Shatner, F.Maxwell, B.Lonsford ...

 
  Critiques Presse 

  bonnes            moyennes           mauvaises      critiques  nd    

 

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Critiques Spectateurs

  bonnes            moyennes           mauvaises 

 

 

Film méconnu et pourtant l'un des meilleurs de son auteur, "The Intruder" arrive tout de suite à nous plonger dans un monde cruel et particulièrement réaliste. Corman arrive d'entrée à nous faire pénétrer dans ses petites bourgades racistes et au combiend angereuses, qui n'attendent en réalité qu'un meneur pour allumer le feu. Mais qu'à cela ne tienne : le film se repose aussi et (surtout) sur un scénario bien ficelé et particulièrement efficace, doté par moment de vrais moments de mise en scène. En effet, que dire de ces saisissants travellings qui nous font ressentir l'incroyable tension sur le visage des Noirs, ou encore cette ville qui semble prête à exploser à chaque instant sous n'importe quel prétexte. Enfin, dans le rôle de l'élément perturbateur, William Shatner (mais oui, le futur capitaine Kirk de "Star Trek"!) livre une performance assez éblouissante, et ce jusqu'à un final qui pourra paraitre peu convaincant à certains, mais qui n'en demeure pas moins magistralement menée, et ce jusqu'à l'ultime scène. Plus qu'une curiosité, "The Intruder" est donc un film à découvrir absolument car il est un plaidoyer antiraciste de superbe facture. Magistral.

Plutôt surprenant de retrouver Roger Corman derrière un projet pareil, celui à qui l'on doit des Séries B & Z telles que L'attaque des crabes géants (1957) ou encore La Petite Boutique des horreurs (1960), s'essaie cette fois-ci à un brûlot sous la forme d'un drame sociétal & racial. L'action se déroule dans un petit patelin du sud des Etats-Unis au milieu des années 60. A cette époque, le racisme est quelque chose de courant et cela tombe plutôt bien car Adam Cramer (membre d'une organisation d'extrême droite) compte bien profiter des habitants de cette ville pour raviver la flamme raciale et ainsi s'opposer à leur intégration. Et il ne passe pas inaperçu, au sein de cette petite bourgade sans problème, où petit à petit, il parvient à faire naître une haine ségrégationniste jusqu'au point de créer un lynchage contre un innocent noir. The Intruder (1961) nous montre à quel point il facile de manipuler les gens ! Un drame très réaliste au scénario efficace et surtout, un William Shatner tout simplement impressionnant !

En 1962, il fallut tout le courage de Roger Corman pour sortir "The Intruder", deux ans avant l’adoption des lois civiques. Avec un budget rikiki, l’auteur de "Mitraillette Kelly" signe un brûlot politique d’une grande intensité. Certes par moment le manque de moyens se fait ressentir mais le spectateur fait abstraction face à la puissance de certaines scènes. Incontestablement, Corman maîtrise son sujet ne laissant rien au hasard : les préjugés, la manipulation, le spectre de la meute. Encore largement méconnu, un long-métrage à découvrir.

Pour Roger Corman un bon film doit divertir et faire réfléchir. « The intruder » est bien sa meilleure illustration du propos. Un scénario dramatiquement très bien construit qui s’ingénie à éviter le préchi prêcha simpliste, et réussit in fine à le mettre du cotée des « méchants », des cyniques. Adam Kramer est en même temps une des grandes silhouettes de prêcheurs solitaires et inquiétants (maléfiques ?) qui hantent le cinéma américain. Excellents film et manifeste militant contre l’instinct grégaire mortifère raciste et ceux qui le manipulent. Le spectacle avec une éthique impeccable.

L'apparition d'un intrus, "The intruder", d'un bonimenteur, qui vient "vendre sa soupe indigeste" en clivant la société. Désigner la menace en l'incarnant à travers l'étranger, c'est une pratique quasi intemporelle. Ici, la loi vient d'autoriser les noirs, les "nègres", à fréquenter les établissements d'enseignement parmi les blancs. Cela pose problème à ces habitants d'une ville du sud des Etats-Unis et un "étranger" à la ville vient attiser haine sous-jacente, ressentiments multiples. Ce que je découvre avec étonnement, c'est que le discours raciste, ségrégationniste se nourrit aussi d'antisémitisme. Les juifs conspirent pour "souiller le sang pur". Ces délires ont un caractère opérant, il suffit qu'une dose suffisante de perversion abreuve les propos du bonimenteur. Ce qui est jubilatoire dans le film de Roger Corman, c'est que la faiblesse interne du beau parleur sera mise à nu. C'est un film quasi pédagogique sur la tolérance et les soubassements des mécanismes de rejet de l'autre.

 

Si le propos de Corman à l’époque et encore aujourd’hui demeure primordial dans la lutte contre toute xénophobie, il est soixante ans plus tard malheureusement dépassé par une réalisation qui en fait des tonnes pour asseoir son autorité. L’autorisation à quelques élèves noirs d’intégrer une école réservée aux blancs provoque la colère des habitants, attisés par un prêcheur venu de la grande ville. L’homme est cynique et roublard, et peuple encore les rues de nos jours, nous rappelle ce film à la mise en scène beaucoup trop appuyée. Elle est lourde, insistante, répétitive, alors que le réalisateur nous laisse entrevoir une autre manière d’appréhender le sujet à travers la personnalité d’un représentant de commerce qui sous des airs balourds va s’opposer au prédicateur. Mais malgré une histoire avec sa femme tout aussi intrigante, le couple n’étoffe guère le film .

Un film étonnamment actuel sur la démagogie politique, le populisme, et l'instrumentalisation du racisme dans le Sud des Etats-Unis. Il ne faut pas toutefois oublier l'époque à laquelle il a été tourné (place de la femme ou des noirs dans le film complètement inadapté aujourd'hui).

De *Roger Corman* on est surtout habitué à ses films d'épouvante notamment ceux adaptés de Poe mais avec **The Intruder** il change de registre en dénonçant le racisme de façon brut et efficace. Bon film bien qu'un peu simple par contre sa courte durée et son montage nerveux en fait un film qui se regarde sans ennui, William Shatner surprend en mégalo raciste même si sa prestation tout comme le film n'est pas renversante et le final un brin convenu se sentait venir. Avec le temps ce film a perdu de son impact mais à l'époque il collait à l'air du temps avec ses écoliers noirs accédant aux écoles de blancs dans le Sud des U.S.A. ; The Intruder est à découvrir plus par curiosité que parce qu'il est un indispensable.

Impossible de regarder ce film sans penser à l'Amérique de Trump et aux suprématistes qui se sentent pousser des ailes... Certains moments de confrontations entre Blancs et Noirs semblent toutefois un peu trop "mignons" en comparaison avec la situation des Afro-Américains en cette période. Belle photographie qui porte de le film jusqu'à son dénouement , lui aussi un peu naïf. Cela m'a donné envie de revoir "Dans la chaleur de la nuit".

 

 

 

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